La musique partout

Il y a de fortes chances que, comme moi, vous ayez grandi avec les cassettes, enregistrant vos chansons préférées lorsqu’elles passaient à la radio, créant ainsi votre propre liste de lecture que vous pouviez emporter avec vous dans votre Walkman. Il s'agissait des premiers jours de la musique portable et personnelle. Auparavant, nous écoutions surtout de la musique dans nos maisons et nos voitures à l’aide de radios et de tours stéréo.

Aujourd’hui, la musique est partout, dans nos maisons et en déplacement. De toutes les formes de divertissement dans nos maisons intelligentes, la musique est omniprésente, à la fois en elle-même et dans le cadre de nos autres activités. La technologie a profondément modifié la manière dont nous consommons et produisons la musique, mais elle n’a pas changé les artistes que nous écoutons : des personnes qui font de la musique. L’IA, capable de générer de la musique, changera-t-elle la donne ?

Nous nous engageons partout avec la musique

Nous utilisons de la musique sur nos appareils personnels au cours de nos activités quotidiennes. Elle nous donne de l’énergie lorsque nous faisons de l’exercice ou que nous faisons le ménage dans notre maison et nous aide à nous détendre et à nous endormir. De plus, la musique étant accessible sur nos appareils personnels et par l’intermédiaire de haut-parleurs intelligents, nos maisons et nos vies sont remplies de musique.

Source : IFPI, 20221M¹

Nous nous engageons dans la musique de manières beaucoup plus variées qu'auparavant : par le biais de services de streaming, de plateformes de médias sociaux, d’applications vidéo de courte durée, de musique en direct, mais aussi en direct et à la radio ou à la télévision (voir le graphique). Selon l’IFPI (l’organisation qui représente les intérêts de l’industrie du disque dans le monde), nous avons écouté 20,1 heures par semaine en 2022 (contre 18,4 heures en 2021).

Ces heures ne sont pas seulement consacrées à l’écoute de musique sur des plateformes de streaming ; la musique est également un élément important d’autres formes de divertissement. Les émissions de télévision ou les films axés sur la musique sont très populaires, puisque 58 % des gens les regardent, selon l’IFPI1. Et 44 % des joueurs de jeux vidéo ont regardé un concert de musique virtuelle sur une plateforme de jeu au cours des trois derniers mois1. Sur les médias sociaux, la musique est utilisée pour rendre les contenus vidéo plus attrayants, ce qui est d’autant plus facile que la plupart des plateformes de médias sociaux souscrivent des licences pour la musique pop auprès des grandes maisons de disques.

Si l’on considère l’ensemble des innovations, il est intéressant de constater que chacune d’entre elles nous a permis de consommer davantage de musique. Du vinyle aux cassettes, en passant par les CD, les lecteurs MP3 et, plus récemment, le streaming, chaque nouvelle technologie a augmenté le nombre de chansons accessibles, la qualité de la musique et la facilité avec laquelle nous pouvions accéder à la chanson que nous voulions écouter.

Tout le monde peut désormais créer de la musique

Aujourd’hui, avec l’IA, le nombre de titres augmente plus rapidement que jamais. Luminate², qui surveille le marché du divertissement et fournit des informations, a récemment constaté qu’au cours du premier trimestre 2023, les services de streaming ont ajouté en moyenne 120 000 nouveaux titres par jour, contre 93 400 par jour pour l’ensemble de l’année 2022.

Selon le PDG d’Universal Music Group, Sir Lucian Grange³, l’IA contribue en partie à cette offre excédentaire. Bien que la plupart de ces contenus soient de mauvaise qualité et créés par les générations précédentes d’IA, les nouvelles générations s’améliorent en matière de création musicale. En avril, un titre généré par l’IA et intitulé « Heart On My Sleeve » imitait si bien les artistes populaires Drake et The Weeknd qu’il est devenu viral avant d’être retiré pour violation des droits d’auteur.

Mais écouterons-nous toute cette musique ?

En 2004, Chris Anderson a publié un article dans Wired (il en a fait un livre par la suite) intitulé The Long Tail. Il a décrit comment la démocratisation de la production et de la distribution, combinée à une réduction des coûts de recherche, modifierait la manière dont nous consommons le contenu en détournant l’attention habituellement portée aux succès traditionnels au profit de niches, des petites publications et des créateurs.

Dans le domaine de la musique, on observe en effet une longue traîne. Et avec l’aide de l’IA, cette longue traîne de contenu de niche va probablement s’allonger. Néanmoins, cette longue traîne s’applique principalement à la production, mais pas tellement à la consommation. Dans son livre Tarzan Economics, Will Page, ancien économiste en chef de Spotify, souligne que les gens passent 90 % de leur temps à écouter moins de 2 % de toutes les chansons sur les plateformes de streaming. C’est la partie gauche, et non la longue traîne, qui alimente la consommation de musique et contient la majeure partie de sa valeur.

Si l’on considère toutes les innovations que la musique a intégrées, toutes les technologies qui ont bouleversé la chaîne de valeur, la personne dont le statut n'a pas changé, c’est bien l’artiste. Dans un océan de contenus créé artificiellement, les artistes peuvent se démarquer encore plus. De plus, ces artistes utiliseront probablement l’IA. Dans une interview récente, Neil Tennant des Pet Shop Boys⁴ a déclaré que l’IA est un outil utile dans la trousse d’un auteur-compositeur, par exemple pour l’aider à surmonter le syndrome de la page blanche.

Tout comme l’industrie musicale craignait les innovations précédentes, il n’y a pas si longtemps, le streaming était considéré comme la mort de l’industrie, l’IA et d’autres innovations pourraient potentiellement améliorer la qualité et créer de nouvelles expériences musicales, à l’intérieur et à l’extérieur de nos maisons.